J’avais 20 ans…
J’avais 20 ans, je pleurais sur mon « sort » et je criais à la vie que j’étais prête à la vivre. Je me couchais à 00h après avoir scrollé des heures, je m’endormais à 2 h, après avoir pleuré un peu, je me réveillais à 5 h, après 30 minutes de rêves, je me levais à 6 h, après quelques minutes de prières.
J’avais 20 ans, je croyais au temps, je m’accrochais à ses teintes, tantôt roses, tantôt bleues, tantôt rouges, d’une minute à l’autre grises. Le temps me semblais infini et je ne courrais pas après lui. Je me répétais « prends ton temps car tu dois apprendre. Le temps est à revendre et toi tu vas l’acheter. » Donc j’offrais le temps que j’avais à qui voulait. Pour du bien, pour du faux, parfois par peur, pour de vrai par principe, par estime , par amour, par respect, par gentillesse. Parfois par crainte de paraitre ringarde, parfois pour me « décoincer », le plus souvent par naïveté. Heureusement, je m’en offrais parfois.
J’avais 20 ans, je lisais beaucoup, je lisais de tout, je voulais apprendre, je voulais savoir, comprendre pour prendre. Prendre de la connaissance, prendre les rennes. De quoi ? Pourquoi ? Je ne sais plus. On m’avait dit « lis ! Le savoir se trouve dans les livres« . Pour le coup c’est une vérité. J’apprenais beaucoup dans mes livres. J’en savais beaucoup ? Non, on en sait jamais assez. Alors je continuais à lire. Je savais l’essentiel pour bien faire mes devoirs, pour bien argumenter, pour être renseignée sur des sujets, pour me divertir. Ca y aidait, alors je continuais. Je tenais une liste de lectures à faire. Je lisais roman, journal, blog, revue, bible. Tout y passait sous mes yeux . Pour que rien ne m’échappe.
J’avais 20 ans, un garçon m’avait pourtant échappé. Mais je l’attendais. Je le disais à qui pouvait l’entendre, que c’était pour toujours et à jamais. Je criais au vent qu’il le ramène et nous réunisse, je colorais mes 20 et … ans avec lui, avec moi. Je n’avais que 20 ans, j’avais tout pour y croire. Pour croire en l’amour d’un seul, pour croire en l’amour de tous. Pour croire en mon cœur et ne pas compter les erreurs, pour pardonner celles des autres aussi.
J’avais 20 ans et je ne savais pas garder mon cœur. A l’église on répétait ce verset: « garde ton cœur plus que tout autre chose car de lui viennent les sources de ta vie » (Proverbes 4:23) . Je le connaissais par cœur, je le citais souvent . Mais je ne savais pas y faire, je croyais savoir, peut être je ne sais toujours pas. On ne sait jamais si on sait garder son cœur. Le cœur surprend toujours, il est espiègle celui là. J’offrais mon cœur à tous. Je ne le gardais point pour moi seul. J’offrais mon cœur aux émotions des autres. Je croyais bien faire. On me disait « tu as le cœur sur la main » , et j’oubliais qu’il est censé rester dans ma poitrine.
J’avais 20 ans, je dessinais des roses, parfois des tulipes, parfois des visages, parfois des mangas , d’autres fois les Wix, d’autre fois des fresques. Je dessinais pour tuer le temps, pour réfléchir, fléchir mes questionnements et mettre sur papier les images que j’avais dans mon esprit. Je dessinais pour me vider l’esprit et les mains, du trop plein de moi. Je dessinais aussi des plans.
J’avais 20 ans je faisais des plans et je les marquais noir sur blanc. Une liste de choses à faire par ci, une autre par là. Des objectifs çà et là, des peurs à surmonter d’autre part. Des voyages à faire par ci, des lieux à visiter par là. Des formations à faire par ci, des évènements auxquels participer par là. Je faisais des plans, des plans pour demain, des plans pour refaire hier. Je prévoyais tout et effaçais des épisodes. J’avais l’âge pour et pourtant je n’avais rien encore fait. Donc j’écrivais tout en grand, je me croyais grande, je me voyais grande.
J’avais 20 ans et j’étais assez grande, pour la moi de 10 ans. Aux yeux de la moi de 15 ans, j’étais au top de l’âge. Assez grande pour créer. Créer cette plate-forme par exemple, assez grande pour oser. Mais pas assez grande pour parler. Assez grande pour écrire, obtenir un diplôme universitaire, mais pas assez pour partager mes petites idées. Assez grande pour penser à demain. Mais pas assez grande pour prévenir demain. Assez grande pour planifier partir. Partir loin de là bas, partir pour revenir, plus grande encore que ça, plus grande que je pensais ne pas être. Partir pour devenir.
J’avais 20 ans et j’écoutais beaucoup de RAP. Mieux J’écoutais du Youssoupha souvent. Ses chansons qui semblent venir du passé, vieux de trop de mots, de réflexions j’imagine. Ces sons pleins de sagesse . Sagesse humaine, sagesse céleste ? Un peu des deux, sagesse tout court. Je repassais en boucle « espérance de vie ». Je savais ce que ça signifiait ? D’une certaine manière. A 19 ans j’avais aperçue un bout de ce qu’est l’espérance d’une famille. Et la famille c’est la vie non ? Je repassais en boucle ce titre je m’écriais dans ma chambre » Youssoupha est trop pur » . Ses paroles me parlaient, celles de grand corp malade aussi. « Je pense donc je suis » me parlait. J’écoutais aussi du Diams et en boucle » j’ai 20 ans » , » si c’était mon dernier « , « écorchée vive ». Je ne l’étais pas j’essayais de comprendre ceux et celles qui l’étaient . Alors j’écoutais « immortel », « essaie encore » de La fouine , j’écoutais du Zaho. J’aimais m’imaginer avoir écrit « allô ». Je ne faisais pas de tri , j’écoutais de tous, je les écoutais tous ?
J’avais 20 ans, je les écoutais un peu trop. C’est l’âge où on se faufile, c’est l’âge ou on ne réfléchis plus ou bien on réfléchis un peu trop. Moi je réfléchissais trop. C’est la grande frontière pour certains, une transition. Pour d’autre, une transition vers un autre soi. Pour moi, c’était l’allée vers la lumière.
J’avais 20 ans, je ne voulais plus trop écouter la petite voix dans ma tête. J’écoutais les conseils, j’écoutais les autres de 20 ans, j’écoutais les plus grands de plus de 20 ans.
J’avais 20 ans, je voulais comprendre.
J’avais 20 ans, je voulais mieux comprendre pourquoi mon père se couchait à la même heure et se réveillais toujours à la même. Pourquoi il ne regardait que le journal télévisé et pas d’autres émissions. Pourquoi tous les soirs il semblait tellement fatigué mais que le Week-End ils ne se reposait pas. Pourquoi il avait choisit de partir.
J’avais 20 ans, je voulais mieux comprendre pourquoi ma mémé était si méfiante de l’être humain. Pourquoi elle demandait toujours les origines tribales de nos ami.e.s, pourquoi elle avait la chansonnette pour chaque situation. Pourquoi elle se sentait obligée d’intervenir dans toutes les conversations. Pourquoi elle ne reconnaissait jamais les personnages de télé dans les feuilletons. Pourquoi elle pardonnais toujours tout et surtout mon oncle.
J’avais 20 ans, je rêvais d’être dans la tête de ma mère. Je voulais savoir si comme moi, à 20 ans, elle avait rêvé. Pourquoi elle avait choisie de rester quand elle aurait pu partir.
J’avais 20 ans et je rêvais. Je rêvais de la moi encore plus diplômée, de la moi indépendante, sans avoir à demander de permission pour sortir ou aller juste au CIRES . Je rêvais de la moi à 25 ans.
J’ai 25 ans …
Je souris à mon « sort », je le nomme « mon don ». Je ne pense plus avoir vraiment un sort, juste un chemin de vie que je ne contrôle pas, mais dont je suis parfois avertie, parfois non. Celui à qui je l’ai remit totalement, en décide. Je cris à la vie que je crois à un nom, qui est au dessus d’elle, que c’était déjà le cas, et que ça n’a pas changé. Je me couche à 23h après avoir écris une heure, je m’endors à 1 h, après scrollé un peu, je me réveille à 4h, pour un temps de prière, je me recouche pour ensuite me lever à 8h.
J’ai 25 ans, j’ai l’impression d’avoir perdue mon temps à 20 ans, pour rien , dans le temps. Je me console, je me dis » tu n’as rien perdu, tu as appris, appris à vivre , appris pour vivre tes 25 ans« .
J’ai 25 ans, je lis encore, toujours. J’avais arrêté un moment, mais là je suis à fond. Je lis ce qui m’éduque, comme toujours. Mais surtout les autobiographies, et davantage ma bible. Récemment j’ai lu « Une éducation« , de Tara Westover, je me suis sentie bénie, d’avoir eu l’enfance que j’ai eu, d’avoir les parents que j’ai, et surtout d’avoir la chance d’avoir découvert cette histoire aussi miraculeuse que dingue.
J’ai 25 ans, j’apprends à garder mon cœur. Il est la chose, l’organe, mon don le plus précieux à présent. Plus j’apprends à le garder, plus je parviens à gérer mes émotions et plus je vais bien. J’en viens à me dire, que je devrais apprendre ce que j’apprends à des plus jeunes. J’aurai aimé qu’on m’apprenne plus tôt.
J’ai 25 ans et mon cœur guérit, tout doucement, mais il guérit, surement.
J’ai 25 ans. On me dit que je suis jeune, on me dit que j’ai le droit, de rêver encore, que j’ai encore le temps, que tout ne fait que commencer quand les 20 ans finissent. Et j’y crois.
J’ai 25 ans, j’ai fait le tour du monde, enfin bref de mon monde. Je n’écoute plus des voix, je n’écoute plus que la petite voix. Je me suis réconcilier avec elle, nous parlons, rions, pleurons, marchons, ensemble et c’est merveilleux. Elle savait que je reviendrais, elle m’attendait.
Jai 25 ans , j’ai parfois des regrets, je suis partie très loin, je ne suis pas encore revenue mais je le prévois toujours.
J’ai 25 ans, je ne dessine plus, je retranscris des paysages, mais aussi des graphiques et des images , que parfois je ne comprends pas, que quelque fois je montre, mais que la plupart du temps je cache. Quelqu’un trouve ça artistique , pour moi ce n’est que du gribouillage et pas plus.
J’ai 25 ans, je n’attends plus aucun garçon, peut être qu’un m’attends, ce que mon frère me dit. Cela m’importe peu, cela ne m’importe plus.
J’ai 25 ans, je suis diplômée, j’en ai un en plus maintenant. Mais qu’importe ? Je me suis cherché , après avoir assimilé, après avoir compris que les opportunités comptent plus que les souhaits et les diplômes. Je les ais quand même obtenu . Mais qu’importe ?
J’ai 25 ans, je commence une vie, sans devoir, sans compos, sans Td. Une vie de deadline, de dossiers à traiter, d’appels à passer ou décrocher, de réunions auxquelles assister … Je planifie toujours tout, j’en suis maintenant experte, je planifie moins bien mieux qu’à 20 ans. Mais plus des objectifs, maintenant des visions. J’écris encore noir sur blanc un peu beaucoup plus. J’écris des révélations ,j’écris mes sentiments, d’autre fois des mots qui veulent rien et tout dire, mais pour ca je me laisse guider.
J’ai 25 ans, j’écoute toujours du Youssoupha. J’écoute du Called out music, beaucoup de Dena Mwana, surtout du Marvel city music. Oui j’écoute de l’anglais ! J’apprends à parler anglais.
J’ai 25 ans, je peux dire que j’apprends à gérer mon temps. Pour le mieux , pour moi, pour eux mais surtout pour moi. Je ne l’offre plus. Je m’en sert pour appliquer ce que j’ai appris à 20 ans.
J’ai 25 ans, et je suis plus que libre , je choisis de l’être. Certains me croient asservie, pour moi c’est la preuve, qu’aux yeux de tous, aucun fer ne me retiens.
Si Rousseau avait raison en disant » L’homme est né libre et partout il est dans les fers » , alors je comprends pourquoi je me sens sauvée de fers avec cette sensation de retrouver ce que j’ai tant recherché.
J’ai 25 ans je ne suis pas parfaite comme je l’espérais à 20 ans, mais au moins je suis libre et en paix.